Dans notre société contemporaine, la nourriture est, semble-t-il, devenue une source plus importante de stress que de plaisir. Depuis les années 50, les guerres s’enchaînent : d’abord les graisses, ensuite les sucres.
Désormais, ce sont, pour ne prendre que ces deux exemples, les résidus de pesticides et les additifs qui sont au cœur de nos préoccupations. S’il est nécessaire d’être vigilant quant à la façon dont ces derniers sont autorisés, il faut être prudent et l’être rigoureusement, de façon méthodique.
Avant toute chose, il est important de faire connaissance avec les additifs, savoir de quoi on parle, connaître leur histoire et savoir qui ils sont réellement.
Ensuite, il convient de se plonger dans la recherche scientifique et dans la réglementation en vigueur, pour démêler le vrai du faux. La recherche est descriptive, là où la réglementation est prescriptive.
Enfin, il semble bon d’aborder les grands défis des prochaines décennies concernant les additifs alimentaires : baisse de l’utilisation, effet cocktail, etc. et de se demander comment il faudrait y répondre. Sans plus attendre, commençons.
Faisons connaissance avec les additifs
Les additifs alimentaires qu’est-ce que c’est ?
La définition d’un additif alimentaire est claire, nette et précise. En effet, selon le règlement européen les additifs alimentaires ce sont :
« Toute substance habituellement non consommée comme aliment en soi et non utilisée comme ingrédient caractéristique dans l’alimentation, possédant ou non une valeur nutritive, et dont l’adjonction intentionnelle aux denrées alimentaires, dans un but technologique, au stade de leur fabrication, transformation, préparation, traitement, conditionnement, transport ou entreposage a pour effet, ou peut raisonnablement être estimée avoir pour effet, qu’elle devient elle-même ou que ses dérivés deviennent, directement ou indirectement, un composant de ces denrées alimentaires »
On comprend donc qu’un additif est une substance chimique naturelle ou synthétique qui va se retrouver dans une préparation alimentaire, souvent pour servir un but précis.
Mais depuis quand sont-ils présents dans nos aliments ?
Pourquoi utilise-t-on des additifs ?
L’Homme a cherché à allonger la durée de conservation de ces aliments depuis le néolithique grâce à des procédés technologiques plutôt que via des additifs alimentaires.
De fait, on a retrouvé des traces très anciennes de pratiques telles que le séchage, l’enfouissage ou encore le fumage.
Cependant, dès l’Antiquité, nous avons eu recours à l’ajout d’une substance fondamentale pour conserver nos aliments : le sel de mer. Mais les Hommes de l’époque utilisaient aussi diverses plantes et aromates pour conserver leur mets.
Mais le concept moderne d’additifs (et leur introduction massive au sein de l’industrie agroalimentaire) comme on les utilise aujourd’hui est extrêmement récent et remonte aux années post seconde guerre mondiale.
Cela s’explique par des causes démographiques (accroissement phénoménale de la population), architecturales (urbanisation, éloignement des lieux de productions alimentaires) et économiques (baisse des coûts de productions) inhérentes à cette époque.
En effet, pour répondre à la famine, des besoins croissants en quantité et une plus grande diversité et qualité des produits, l’industrie a commencé à utiliser des additifs pour éviter les risques sanitaires.
Les différentes familles d’additifs
Les additifs sont une immense famille de composés et ils ne servent pas tous à la même chose. Parmi eux, on en distingue 5 grandes sous-catégorie telles que :
- Les colorants (E100 à E199) qui comme leur nom l’indique, servent à donner une couleur aux produits.
- Les conservateurs (E200 à E299) qui comme leur nom l’indique, servent à conserver plus longtemps les produits.
- Les antioxydants (E300 à E321), qui sont utilisés, la plupart du temps pour réguler l’acidité des aliments et parfois pour séquestrer l’eau.
- Les agents de textures, qui sont utilisés pour améliorer ou modifier la texture d’un aliment donné.
- Les édulcorants, qui sont utilisés pour conférer un goût sucré aux aliments, sans apporter de calories ni influencer la glycémie.
Additifs : bons ou mauvais ?
Parmi tous ces additifs, certains sont autorisés (toujours à une certaine dose qu’on appelle dose journalière admissible ou DJA) et s’ils ne le sont pas clairement, ils sont interdits.
Dès lors, il ne semble pas approprié de combattre l’ensemble des additifs. Il ne faut pas tous les juger de la même manière. Enfin, rappelons qu’il est futile de parler « des additifs » en général, car, comme nous l’avons vu, cela regroupe un ensemble de molécules radicalement différentes, dont l’utilisation ne sert pas toujours les mêmes objectifs.
Les additifs à risque (balance bénéfices/risques)
La balance bénéfices-risques positive
A priori de toutes données, on pourrait dire que les bons additifs sont ceux qui apportent plus de bénéfices qu’ils ne font encourir de risque : c’est le concept de la balance bénéfices-risques.
Les problèmes se posent éventuellement lorsque l’évaluation est trop « révolutionnaire » pour le monde de la sécurité alimentaire.Rappelons encore que la nouvelle étude en date ne prouve rien.
Une évaluation dans un contexte donné, avec une quantité de données plus importantes pour éviter les biais statistiques et la prise en compte, encore et toujours, de la balance bénéfice risque, sont nécessaires. Si l’on veut émettre un avis semblable à ceux des autorités sanitaires, c’est le travail qu’on se doit d’entreprendre.
Par exemple, l’impact sur le microbiote n’est pas encore pris en compte par les autorités sanitaires dans leur évaluation.
La balance bénéfices-risques négative
Attention cependant aux substances qui apportent plus de risques que de bénéfices. Ils sont généralement interdits par les autorités sanitaires. Mais lorsque ce n’est pas le cas et que l’on détient des preuves solides, il est bon de tenter de lancer l’alerte sur le sujet.
Le Principe de précaution
L’absence de preuve n’est pas la preuve de l’absence. Il faut donc tenter de construire un faisceau de preuves concordant pour chaque additif et cocktail d’additifs, et intégrer cela au sein d’une balance bénéfice/risque adaptée pour juger de ces questions.
Notons bien que, en l’absence totale de données, il vaut mieux ne rien commercialiser.
De plus, c’est à long terme que le doute subsiste. Par exemple, des groupes de recherches sont en train d’étudier le lien potentiel qu’il pourrait exister entre certains additifs alimentaires et le développement des maladies chroniques de l’intestin (MICI), même si à ce jour, on ne peut faire aucune recommandation sérieuse.
Mais c’est pourquoi, il faut vivement conseiller de faire des aliments contenant des additifs (surtout ceux qui sont controversés) l’exception et non la règle de notre régime alimentaire, tant que nous n’avons pas plus de recul ou que nous ne savons pas bien mesurer les effets et établir ladite balance à long terme.
L’effet cocktail : des risques difficiles à mesurer
On sait désormais que la dangerosité d’une molécule n’est pas uniquement due à sa dose.
Le concept d’effet cocktail nous montre bien que certaines molécules, même à des doses très faibles où le risque toxicologique est presque inexistant si la molécule est seule, peut clairement exister s’il y a présence d’autres molécules particulières.
En effet, certaines molécules ont une toxicité qui ne dépend pas que de leur dose, mais de leur interaction avec d’autres molécules. C’est typiquement le cas des perturbateurs endocrinien.
Cet effet cocktail est donc un élément qui reste à prendre en compte dans l’étude des impacts potentiels des additifs sur la santé, même s’il reste presque impossible à mesurer.
Les grands défis concernant les additifs
Baisse d’utilisation pour les industriels
Comme premier défi, les industriels vont être contraints, si la tendance se poursuit, d’utiliser de moins en moins d’additifs pour satisfaire la demande du consommateur.
Dans le cadre du projet Oqali (Observatoire de la qualité de l’alimentation), l’ANSES et l’Institut Nationale de la Recherche Agronomique (INRA) ont travaillé ensemble et nous informe sur l’évolution de l’utilisation des additifs alimentaires en France sur la période 2008-2012 (premier suivi), 2012-2018 (second suivi), avec un nouveau rapport.
Les experts ont scruté plus de 20.000 produits pendant 10 ans. Leur conclusion est la suivante : nous sommes passés de 13,7 % à 18,7 % de produits sans additifs.
Ce déclin semble clairement en lien avec la demande du consommateur. Cependant, il faut mettre en relation cette demande avec le savoir scientifique.
C’est dans cette optique que Siga souhaite accompagner les industriels, en leur permettant de faire un choix basé sur les attentes du consommateur et sur la meilleure science pour prendre soin de notre santé au mieux.
Une réglementation plus préventive
Comme toutes les questions où interviennent d’innombrables facteurs, un autre défi reste la question de la régulation des additifs.
Il semble qu’il y ait plusieurs choses extrêmement importantes à retenir si nous voulons, collectivement, mieux comprendre, et donc mieux aborder le sujet des additifs alimentaires.
La recherche concernant les additifs alimentaires et les effets sur la santé oriente les textes de réglementations en vigueur pour encadrer leur évaluation.
Ces derniers vont connaître de grands challenges dans les années à venir.